Offert en 1770 au roi Louis XV par le gouverneur de Chandernagor, ce rhinocéros indien mâle est l’un des spécimens les plus emblématiques du Muséum national d’Histoire naturelle.
Ces deux pièces historiques sont aujourd’hui réunies au sein du projet e-COL+ grâce à la numérisation 3D.
Dans les coulisses d’un chantier exceptionnel
Pour rendre possible cette opération, une véritable logistique s’est mise en place. Un mardi, jour de fermeture au public, conservateur de la Galerie d’Anatomie Comparée et de Paléontologie, chargé de collection, préparateur ostéologique et gestionnaire de collections ont coordonné leurs efforts. Le squelette, trop lourd et installé sur un socle à un mètre du sol, ne pouvait être déplacé. Il a donc fallu dégager l’espace, déplacer avec précaution plusieurs squelettes voisins et aménager une zone de travail pour les opérateurs 3D.
Travailler dans la Galerie d’Anatomie comparée n’a rien d’ordinaire : allées étroites, estrades légèrement vibrantes, hauteur du spécimen… Pour atteindre les parties supérieures du crâne et de la colonne vertébrale, les opérateurs de la plateforme Surfaçus ont dû travailler perchés sur un escabeau, dans une chorégraphie précise et minutieuse mais en toute sécurité.
Le squelette a été numérisé à l’aide du Go!SCAN Spark de Creaform, acquis dans le cadre du projet e-COL+. Ce scanner utilise une projection de motifs de lumière blanche, dite lumière structurée, permettant de capturer la géométrie fine des objets sans contact avec le spécimen. Environ cinquante petites cibles ont été fixées sur les os pour aider l’appareil à se repérer dans l’espace.
Pendant deux heures et demie, les opérateurs ont patiemment parcouru chaque surface, enregistrant reliefs vertébraux, cage thoracique, contours des membres et détails du crâne. Mais un imprévu est venu troubler la séance : le soleil, filtrant à travers les hautes fenêtres de la Galerie, nimbait le spécimen de lumière, perturbant les motifs projetés par le scanner. Grâce à des couvertures occultantes et à une bonne dose d’ingéniosité, la numérisation a pu reprendre. Trois jours de post-traitement plus tard, le modèle 3D rejoignait le corpus e-COL+.
Le rhinocéros naturalisé, un retour triomphal
L’histoire du spécimen ne s’arrête pas là. Sa naturalisation a récemment été restaurée avec soin, avant de s’envoler pour Londres où elle a été présentée au Science Museum dans l’exposition Versailles : Science and Splendour (novembre 2024 – avril 2025) Le Rhinocéros de Louis XV à Londres | MNHN. À son retour au Muséum, elle a elle aussi été numérisée grâce au même scanner Go!SCAN Spark. Cette fois, l’opération fut plus aisée : en deux heures, et après avoir habillé le rhino de 124 pastilles de repérage, la forme complète de l’animal a pu être captée. Seule difficulté : accéder à la face ventrale, trop proche du socle pour la distance de travail de l’appareil.






Cette numérisation sans contact est idéale pour des spécimens anciens et fragiles, et vient enrichir la documentation scientifique de ce rhinocéros royal.